Le 13 juin 2023, je posais une première question écrite au gouvernement, lui faisant remonter les nombreuses aberrations rapportées par des lycéens, leurs parents ou leurs enseignants lors de la parution des résultats de Parcoursup. Comme c’est souvent le cas quand une réponse est faite à un parlementaire, je reçus un long développement tentant de me démontrer les bienfaits du dispositif, et ne répondant pas à ma demande qui était de savoir s’il était envisagé, dans un souci légitime de transparence, d'obliger les établissements d'enseignement supérieur à rendre publics les algorithmes dits locaux qu'ils ont mis en place.
Toujours pas rassuré ni convaincu, le 13 février 2024, je posais une seconde question demandant à la ministre quelles mesures étaient envisagées afin que soit respectée dans les plus brefs délais l'obligation de transparence voulue par le code des relations entre le public et l'administration, tout en assurant la protection des données hébergées par la plateforme. Je souhaitais aussi savoir quelles solutions étaient prévues en cas d'attaque massive du système. Nouvelle fin de non-recevoir sur la demande de transparence des algorithmes par un ministère prétendant ainsi protéger... les failles de sécurité du dispositif. À chaque fois, un même leitmotiv : tout va bien, tout va même mieux d’année en année.
2025 : une lycéenne, Morgane, s’amuse à déposer sur Parcoursup, en autres réponses farfelues, une recette de brownies, à la place de la lettre de motivation demandée à chaque candidat. Contrairement à toute logique, son dossier n’est pas rejeté. Ses souhaits sont même validés par ce dispositif sur lequel le ministère m’avait répondu en 2023 : « L'examen des candidatures n'est pas fondé sur les seules notes scolaires [sic] mais peut prendre en compte la motivation, l'engagement, le savoir-être, les compétences acquises ». Culinaires aussi ?
La jeune fille publie alors une vidéo sur Tik Tok, où elle raconte ses aventures sur Parcoursup. Sa publication enregistre plus d’un million de vues. Elle est alors convoquée, semoncée et obligée de retirer sa vidéo, illustrant ainsi le bon vieil adage : « Toute vérité n’est pas bonne à dire. »
Je n’épiloguerai pas sur la réaction consternante de l’administration et sur l’image qu’elle donne d’elle-même à cette jeune fille, ainsi qu’à tous ceux qui ont vu sa vidéo Par cette démonstration par l’absurde, Morgane a démontré avec brio l’obligation de transparence des algorithmes utilisés ! C’est à ce prix que le dispositif peut espérer reconquérir un peu de crédibilité. « Toutes vérités ne sont pas bonnes à dire, mais elles sont bonnes à entendre[i]. »
[i] Madame du Deffand, Lettre à Horace Walpole, le 20 juin 1779
Philippe LATOMBE